Extrait
Le ciel est rempli de dieux et de héros. Les planètes s’appellent Jupiter, Mars ou Vénus, les constellations Hercule, Orion ou Cassiopée. Le Soleil est la grande déesse Amaterasu chez les Japonais, Rê pour les Égyptiens et Apollon chez les Grecs de l’Antiquité. L’homme l’a pressenti en y plaçant tous ces personnages, en s’inspirant des astres pour construire quantité de mythes fondateurs et en voulant trouver une logique à l’ordonnancement des cieux : c’est dans l’espace immense posé au-dessus de sa tête que s’est écrit le récit de ses origines et c’est dans le ciel que nous n’avons cessé de chercher la réponse à la question : « D’où venons-nous ? ». En essayant de comprendre les astres, nous avons toujours voulu nous comprendre nous-mêmes. C’est donc tout naturellement que l’astronomie fait partie des sciences les plus anciennes. Pourtant, ce n’est qu’à partir de 1609 qu’elle a pris son essor. Cette année-là, l’Anglais Thomas Harriot et l’Italien Galilée braquent pour la première fois une lunette vers le ciel, donnant naissance à l’astronomie moderne qui consiste à porter le regard là où l’œil humain s’arrête et à voir toujours plus loin dans l’espace. Cela revient à remonter dans le passé du cosmos, car les images que nous recevons des étoiles et des galaxies lointaines ont mis des milliers, des millions voire des milliards d’années à nous parvenir. Certains des astres que nous observons dans un télescope ont en réalité disparu depuis longtemps et les astronomes sont en quelque sorte les archéologues de l’Univers. À bien y réfléchir, il s’agit tout de même de drôles de chercheurs. Quel paradoxe vivent ces scientifiques à ne jamais pouvoir toucher, découper, tester l’objet de leur passion ! À l’exception des roches et des poussières lunaires rapportées par les missions américaines Apollo et des météorites tombées sur la surface de la Terre, jamais ils n’ont pu manipuler physiquement de morceaux d’astres… Qu’à cela ne tienne, les astronomes sont des télétravailleurs. Leurs mesures se font à distance et les ondes électromagnétiques émises par les étoiles ou réfléchies par les planètes sont pleines de renseignements cryptés. À qui sait les décoder, elles disent des températures, elles livrent des compositions chimiques, elles donnent des vitesses. Le télescope se fait tour à tour thermomètre, paillasse et cinémomètre. L’astrophysique est une science des extrêmes, du calcul et de l’imagination. Pour retracer l’histoire de l’Univers depuis le big bang jusqu’au temps présent, il a fallu jongler avec l’impératif de la gravitation, qui commande aux astres massifs ainsi qu’aux grandes distances, et avec la physique des particules, qui se cantonne à l’infiniment petit et règle la vie de la matière. Il a fallu modéliser l’apparition des protons, des neutrons, des électrons, puis des atomes qu’ils constituent, calculer le comportement de cette soupe primordiale dans le cosmos naissant, comprendre comment on a pu passer de ces immenses nuages de gaz à la première génération d’étoiles, celle dont nous sommes tous plus ou moins directement les enfants, les héritiers. Car c’est dans les forges stellaires que se sont fabriqués les éléments qui nous paraissent banals : ce carbone, cet oxygène, cet azote, ce silicium, ce fer sans lesquels ni la Terre ni la vie ne seraient apparues. L’histoire de l’Univers est celle d’une complexification croissante, un peu à l’image de ce qu’est la vie sur notre planète. Là aussi, c’est de la mort des étoiles que naissent d’autres étoiles, différentes, plus riches, plus complexes, capables de vivre plus longtemps. C’est aussi une histoire de violence : les galaxies s’entrechoquent, les étoiles entretiennent en elles le feu thermonucléaire puis finissent, pour les plus grosses, par exploser de manière spectaculaire, expulsant une partie de leur cadavre dans l’espace comme pour l’ensemencer et créant parfois, avec ce qui reste, de véritables monstres cosmiques qui défient l’entendement : étoiles à neutrons plus lourdes que notre Soleil, mais pas plus grandes que Paris, ou trous noirs gloutons, dévoreurs ultimes de matière d’où rien ne ressort jamais, pas même la lumière. Dans l’Égypte antique, on pensait que le Soleil, Rê, était sorti de l’océan originel avant de donner naissance à l’air, à l’eau, à la Terre et au ciel. En Grèce, Hésiode raconte dans sa Théogonie que du chaos initial sont issus Éros, le désir amoureux, et la Terre, Gaia. Dans l’Ancien Testament, la Genèse dit comment Dieu a d’abord créé la lumière puis la Terre, la végétation, le Soleil et la Lune, les animaux et l’homme. L’astrophysique s’inscrit à sa manière dans le droit fil de ces cosmogonies. Tout comme ces récits mythiques, elle retranscrit l’histoire de l’Univers et même si les termes qu’elle emploie sont un peu techniques, cette science nous livre un récit fabuleux, une épopée dont les héros sont l’espace, la matière et l’énergie, mais aussi, pour une petite partie de l’histoire, les hommes.
L'histoire de l'homme têtu qui a découvert en 1922 le tombeau de
Toutankhamon, l'une des rares nécropoles égyptiennes quasi intactes.
Ce coffret la seconde moitié de l'intégrale des entretiens radiophoniques entre Paul Léautaud et Robert Mallet suivi des entretiens inédits de Julien Benda et Paul Léautaud réalisée sous la direction d'Edith Silve ( Chargée de la publication des oeuvres inédites de Paul Léautaud). Les entretiens Léautaud-Mallet sont considérés comme une oeuvre radiophonique qui fait référence à la fois dans le monde des Lettres et des Arts mais aussi dans l'histoire du journalisme et des média. Pour la première fois, l'INA et Frémeaux & Associés éditent, avec le concours de la Scam, l'intégrale des célèbres entretiens de Paul Léautaud avec Robert Mallet.
Patrick Frémeaux
« Un écrivain qui reçoit un prix littéraire est déshonoré. »
Paul Léautaud - Extraits des Entretiens avec Robert Mallet
Il est là dans les studios, le petit bonhomme qui avait pourtant bien dit à Robert Mallet qu'il ne viendrait pas à la radio : 'je ne suis pas un cabotin !' Il vient pour médire de tous et de tout. On dit que les rues se vident à l'heure des entretiens et que de Charles de Gaulle aux étudiants qui s'entassent dans les bars du quartiers latin, tous écoutent avec ravissement ce redoutable petit vieillard attaquer les plus illustres gloires de la littérature française.
Lequel va être la marionnette à abattre aujourd'hui ? L'émission est explosive et on surnomme Léautaud la dynamite des ondes. La dynamite à quatre-vingts ans et elle est plus active que jamais. La poésie de Valéry ? - ça ne m'intéresse pas du tout, répond Léautaud, c'est de la fabrication. Je le dis toujours, il n'y a pas, pour moi, dans toute l'oeuvre de Valéry un seul vers qui vaille celui de Verlaine : l'espoir luit comme un brin de paille dans l'étable. Et pan ! Un coup de canne sur le plancher en guise de ponctuation. Sa famille et ses maîtresses ont droit au même traitement que les gens de lettres. Sa mère ? une petite catin. Son père ? Un coureur de jupons. Ses maîtresses ? Seul le sexe compte, surtout pas de coeur dans l'affaire.
Il s'affiche comme un sans foi ni loi et ses propos sont si provocateurs qu'il faut bien, parfois, censurer ses débordements. Et pourtant, la douceur, l'amour, la tendresse sont là lorsqu'il évoque son enfance, les animaux abandonnés qu'il recueille, ou les poètes qu'il aime, comme Verlaine, Charles Guérin. Tenir son journal entouré de ses chats représente la seule forme de bonheur qu'il connaisse.
Cet écrivain qui parle à travers un masque sous lequel il dissimule sa fragilité, sa pudeur, sa peur de la mort et de l'amour, est bien un grand acteur dont les entretiens avec Robert Mallet en sont le témoignage. Les centaines de lettres qu'il reçut des auditeurs prouvent l'immense intérêt qu'il suscita en 1951. Aujourd'hui, ces entretiens font partie de notre patrimoine national.
Edith Silve