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Littérature
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Plage de Manaccora, 16h30
Philippe Jaenada
- Grasset
- Littérature Française
- 21 Janvier 2009
- 9782246680291
« Un immense rideau de fumée grise et noire s'élevait jusqu'au soleil, qui n'était plus qu'une petite boule rouge voilée, de grandes flammes folles longeaient les trois quarts de la plage maintenant plongée dans l'ombre, où des centaines de personnes abandonnées s'entassaient sur la dernière zone encore respirable, plus pour longtemps... » Tout avait pourtant si bien commencé. Voltaire, écrivain quadragénaire, Oum sa femme, Géo leur petit garçon, étaient en vacances au bord de l'Adriatique, fin juillet. Insouciants, sous le soleil implacable. Survint le feu, puis la panique, la course, la lâcheté qu'on découvre en soi, le courage aussi s'il faut sauver les siens. On s'agenouille même au pied d'une Vierge étrangement posée sur une plage italienne. Philippe Jaenada revient à son meilleur : le portrait d'humains à la dérive, la vanité de leurs efforts, la beauté fragile de la vie. Un magnifique roman d'une drôlerie désespérée.
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Vie et mort de la jeune fille blonde
Philippe Jaenada
- Grasset
- Littérature Française
- 1 Septembre 2004
- 9782246789208
Le Livre:
Célibataire endurci, bientôt quadragénaire, le narrateur trompe l'ennui d'une existence creuse entre belotes de comptoir, plateaux télé, aventures sans lendemain, et dîners parisiens sans intérêts autre que de donner « l'impression (fausse) de vivre des choses étranges. »
Pourtant ce soir-là, chez Alice et Paul Muratti, après quelques whisky et le traditionnel duel de baffes organisé par les hôtes pour mettre leurs convives en appétit, quand le maître de maison évoque le destin de Céline, sa fille, adolescente incontrôlable, bientôt toxicomane, le narrateur, brutalement projeté vingt-cinq ans en arrière, se souvient : à Carcans-Maubuisson, par une après-midi ensoleillée, c'est Céline Muratti, il en est sûr, qui lui a fait découvrir, gentille et dépravée, les joies et les misères du sexe...
Le narrateur part alors à la recherche de cette fille, jadis singulière Lolita de 13 ans, aujourd'hui droguée, prostituée, malade peut-être, épave misérable. Quête nostalgique mais aussi coupable de celui qui croit pouvoir retrouver, en même temps que le souvenir lumineux de sa jeunesse, un sens à sa vie...
Esprit à la fois observateur et fantasque, Philippe Jaenada, avec cet humour qui caractérise son style, ici apparemment flegmatique, là laissant libre cours à la fragilité et l'émotivité des êtres, déroule son récit en une succession de scènes dont l'incongruité ou l'extravagance burlesque n'ont d'égal que la justesse. Vie et mort de la jeune fille blonde se lit comme une fable moderne où, contre toute attente, la drôlerie et la légèreté l'emportent sur la gravité du cours des choses... -
Jadis, Bix Sabaniego ne se couchait jamais avant l'aube. On parle d'un temps où il n'était pas marié et père de famille. C'est un révolté placide, un enragé doux qui se rêve en tigre (ou en ours). Et puis, un jour, une dispute conjugale, et le voilà parti, sac écossais sur l'épaule, dans une errance fortement alcoolisé, un bad trip aux couleurs de tous les bars du canal Saint-Martin, puis par cercles concentriques, le Lutetia, le Lubéron, et enfin un banc à Monaco. Splendeur, décadence et résurrection d'un Don Quichotte dont les moulins à vent seraient autant de brunes à fortes poitrines et à cervelles réduites. Sur le chemin qui le mène en enfer, on croise toute une humanité fracassée, des compagnons de beuverie, gueules cassées et amnésiques, une fille-fantasme, un ours kidnappeur, un champion de poker qui perd sa vie par insouciance, et même un couple échangiste en bonne santé...
La touche Jaenada, c'est la drôlerie et le désespoir, la chute sans fin et la lumière, là-bas, au bout du tunnel. C'est un romancier moderne et rock : un menteur qui dit la vérité. -
Quand Hector a rencontré Pimprenelle, elle était « la femme la plus légère de la création, une fille irrésistible et seule ». Célibataire endurci, drageur compulsif, pilier de comptoir, piéton de Paris aux activités souvent floues, tantôt détective, tantôt pigiste travaillant la nuit pour la presse « people », Hector accepte de changer de vie par amour. Comme dans un conte moderne, ils emménagent ensemble, ils ne cessent plus de faire l'amour, ils ont un enfant, Oscar. Mais c'est une autre femme, une Pimprenelle maniaque jusqu'à l'obsession, une psychopathe du rangement et de l'autorité qu'Hector retrouve, telle une Gorgone, en face de lui. « C'est risible à dire, j'ai honte de sombrer là-dedans, mais elle m'a trahi ».
Au-delà de la querelle de couple, de l'affrontement sur le ring du quotidien, ce qui retient le lecteur, dans le roman le plus maîtrisé de Philippe Jaenada, c'est ce comique désespéré, cet humour sombre, nerveux, fantasque, tout en digressions, en incises. On assistera à un accouchement « en direct » où le père dépassé, prend l'apparence de Hugh Grant ; à la course d'un cheval aveugle qui galope pour trouver une mort certaine ; à la déchéance d'un homme, qui fut libre autrefois, et n'a plus pour compagnie que les conversations des anonymes, des bouts de phrases, des solitudes qui se mêlent à la sienne. Il lui reste la fuite, « comme un cosmonaute, avec l'espace infini autour »...