« La première fois que j'ai entendu parler de Thomassin, c'était par une directrice de casting avec qui il avait travaillé à ses débuts d'acteur. Elle m'avait montré quelques-unes des lettres qu'il lui avait envoyées de prison. Quand il a été libéré, je suis allée le voir. Routard immobile, Thomassin n'aime pas bouger hors de ses bases. Il faut se déplacer. Je lui ai précisé que je n'écrivais pas sa biographie, mais un livre sur l'assassinat d'une femme dans un village de montagne, affaire dans laquelle il était impliqué. Mon travail consistait à le rencontrer, lui comme tous ceux qui accepteraient de me voir. »
F. A.
Le village, c'est Montréal-la-Cluse. La victime, c'est Catherine Burgod, tuée de vingt-huit coups de couteau dans le bureau de poste où elle travaillait. Ce livre est donc l'histoire d'un crime. Il a fallu sept ans à Florence Aubenas pour en reconstituer tous les épisodes - tous, sauf un. Le résultat est saisissant. Au-delà du fait divers et de l'enquête policière, L'Inconnu de la poste est le portrait d'une France que l'on aurait tort de dire ordinaire. Car si le hasard semble gouverner la vie des protagonistes de ce récit, Florence Aubenas offre à chacun d'entre eux la dignité d'un destin.
Florence Aubenas est grand reporter au journal Le Monde. Elle a notamment publié La Méprise : l'affaire d'Outreau (Seuil, 2005) et Le Quai de Ouistreham (L'Olivier, 2010), qui a connu un immense succès et redéfini la notion de journalisme d'immersion.
À l'été 1953, un jeune homme de 24 ans, fils de bonne famille calviniste, quitte Genève et son université, où il suit des cours de sanscrit, d'histoire médiévale puis de droit, à bord de sa Fiat Topolino. Nicolas Bouvier a déjà effectué de courts voyages ou des séjours plus longs en Bourgogne, en Finlande, en Algérie, en Espagne, puis en Yougoslavie,
via l'Italie et la Grèce. Cette fois, il vise plus loin : la Turquie, l'Iran, Kaboul puis la frontière avec l'Inde. Il est accompagné de son ami Thierry Vernet, qui documentera l'expédition en dessins et croquis.
Ces six mois de voyage à travers les Balkans, l'Anatolie, l'Iran puis l'Afghanistan donneront naissance à l'un des grands chefs-d'oeuvre de la littérature dite " de voyage ",
L'Usage du monde, qui ne sera publié que dix ans plus tard - et à compte d'auteur la première fois - avant de devenir un classique.
Par son écriture serrée, économe de ses effets et ne jouant pas à la " littérature ", Nicolas Bouvier a réussi à atteindre ce à quoi peu sont parvenus : un pur récit de voyage, dans la grande tradition de la découverte et de l'émerveillement, en même temps qu'une réflexion éthique et morale sur une manière d'être au monde parmi ses contemporains, sous toutes les latitudes.
APRÈS LE RÉCIT, L'ALBUM DE L'ÉTONNANT VOYAGE D'UN ÉCRIVAIN NOMADE, ASSORTI D'ILLUSTRATIONS DE L'AUTEUR ET DE PHOTOS INÉDITES.
Le texte intégral accompagné de 130 photos et dessins.
Un mois sur le Camino del Norte, de Bayonne à Santiago, 40 kilomètres de marche par jour : étape après étape, Jean-Christophe Rufin se transforme en clochard céleste, en routard de Compostelle.
Pourquoi prendre le Chemin, quand on a déjà éprouvé toutes les marches, toutes les aventures physiques ? Je n'avais en réalité pas eu le choix. Le virus de Saint-Jacques m'avait profondément infecté. J'ignore par qui et par quoi s'est opérée la contagion. Mais, après une phase d'incubation silencieuse, la maladie avait éclaté, et j'en avais tous les symptômes.
876 kilomètres plus loin, un mois plus tard, après l'arrivée à Santiago, le constat est là. Comme tous les grands pèlerinages, le Chemin est une expérience de désincarnation, il libère du trop-plein, mais il est aussi un itinéraire spirituel, entre cathédrales et ermitages, et humain, car chaque rencontre y prend une résonance particulière.
À ce récit dans lequel Jean-Christophe Rufin conjugue la gravité à l'auto-dérision, entre choses vues et anecdotes, s'ajoutent ici les images : instantanés comme en réalisent tous les Jacquets, désireux de se revoir sur le Chemin, dessins en forme de carnet de voyage, objets fétiches - la credencial, feuille de route dont les tampons suivent les pas du pèlerin - ou vues panoramiques qui renvoient à la force et à la beauté des paysages.
Casablanca la bruyante océanique, Tanger la rêveuse méditerranéenne et Fès la spirituelle septentrionale forment le triangle d’or du nouveau livre de Tahar Ben Jelloun. C’est dans ce plus beau pays du monde que l'auteur situe ses histoires, terribles ou au contraire légères, baladant son lecteur à travers les siècles, les langues et les deux rives de la Méditerranée. Il nous rappelle la richesse d’un Maroc polyglotte et multiculturel et invente des personnages qu’un hasard bouscule, venant transformer le cours de leur vie : une femme qui décide de vous ruiner, des imbroglios administratifs qui vous rendent l'existence infernale, un amour de jeunesse qu’il n’aurait pas fallu revoir, les convives d’un dîner aux prises avec le poids des traditions... D’une médina à une mégalopole, d’une paillote à un hôtel luxueux, d’une corniche maritime à un palais merveilleux, l'écrivain déploie sa narration en célébrant l’humanité sensible qui compose le Maroc.Tahar Ben Jelloun est un écrivain franco-marocain à la carrière internationale. Il a publié la majeure partie de son œuvre au Seuil dont L’Enfant de sable, La Nuit sacrée (prix Goncourt en 1987) ou encore Le Racisme expliqué à ma fille.
"Victor" est un récit de famille. Claudie Gallay y écrit l'histoire de son grand-père, abandonné lorsqu'il était enfant, et y dresse, en filigrane et au gré des narrations familiales, le portrait fictif ou réel de son arrière-grand-père, Victor. Le texte interroge ainsi la fiction : nos souvenirs et les anecdotes transmises étant déjà une réécriture de notre propre histoire.
« Partout, il y avait trop de bruit, trop de discours. Un jour, j'en ai eu marre de cette frénésie et je suis parti. Certains vont chercher le bonheur en Alaska ou en Sibérie, moi je suis un aventurier de la France cantonale : je lorgne du côté d'Aubusson, du puy Mary et du plateau de Millevaches »
Sans le moindre sou en poche, misant sur la générosité des gens, un jeune aspirant jésuite s'échappe de la ville et de la modernité avec le désir de renouer avec l'élémentaire.
Il s'offre une virée buissonnière à travers les déserts du Massif central. Une petite promenade de sept cents kilomètres à pied. Le chemin des estives, récit de ce voyage, est une ode à la désertion, à la liberté, à l'aventure spirituelle. On y croise les figures de Rimbaud, de Charles de Foucauld, mais aussi des gens de caractère, des volcans, des vaches.
Au fil des pages, une certitude se dessine : le bonheur est à portée de main, il suffit de faire confiance et d'ouvrir les yeux.
"Aller vers ceux qu'on aime, c'est toujours aller vers l'au-delà."
J'ai écrit ce livre en hommage à ma grand-mère maternelle, Idiss.
Il ne prétend être ni une biographie, ni une étude de la condition des
immigrés juifs de l'Empire russe venus à Paris avant 1914.
Il est simplement le récit d'une destinée singulière à laquelle jai
souvent rêvé.
Puisse-t-il être aussi, au-delà du temps écoulé, un témoignage
d'amour de son petit-fils.
"Après les aventures d'Émile Ajar, plus de quarante années se sont écoulées, durant lesquelles j'ai dû vivre. Avant qu'il ne soit trop tard, j'ai décidé d'assembler les souvenirs de ceux que j'ai aimés et qui ont disparu". Paul Pavlowitch se souvient de ceux qui ont partagé sa vie, les icônes Romain Gary et Jean Seberg. Parcourant sa mémoire et ses carnets de notes, il raconte le destin de ces deux magnifiques immortels et l'histoire de leur tribu familiale. Tous ensemble, ils menèrent une "guerre à mort" contre la réalité, bousculèrent le monde de la littérature, firent de leur vie un roman. Pour le meilleur et pour le pire. Tous immortels : plus de dix années d'écriture, un document exceptionnel et une stupéfiante liberté. Paul Pavlowitch est écrivain. Tous immortels est son septième livre. Il a incarné le personnage d'Émile Ajar - pseudonyme de Romain Gary, son cousin - de 1973 à 1981.
« Je me suis réveillé un matin, et les Dieux de la mythologie grecque étaient revenus parmi nous... »
Portés par le souffle de l'Iliade et de l'Odyssée, les premiers pas en littérature d'un dessinateur culte. Savant, hilarant et fantaisiste : un miroir ironique tendu à notre époque désorientée.
Jul est dessinateur, auteur de Silex and the City en BD et sur Arte, scénariste de Lucky Luke et sinologue tout à la fois. Il est parvenu en quelques années à créer un univers irrésistible, aux frontières de l'humour, de l'histoire et de la critique sociale.
Comme souvent dans les récits de David Grann, un homme est dévoré par son idéal.
Ce personnage d'un autre temps sorti tout droit d'un film de Werner Herzog, se nomme Henry Worsley. The White Darkness raconte son extraordinaire histoire. Celle d'un militaire britannique fasciné par l'exemple d'Ernest Shackleton (1874-1922) et par ses expéditions polaires ; un homme excentrique, généreux, d'une volonté exceptionnelle, qui réussira ce que Shackleton avait raté un siècle plus tôt : relier à pied une extrémité du continent à l'autre. Une fois à la retraite, il tentera d'aller encore plus loin en traversant l'Antarctique seul, sans assistance.
Il abandonne tout près du but, dans un état de santé tel qu'il meurt quelques heures après son sauvetage. Édifiant destin d'un homme perdu par une quête d'impossible, qui n'est pas sans rappeler Percy Fawcett, autre explorateur guidé par une obsession, dont David Grann avait conté l'histoire dans La Cité perdue de Z.
"Tout le monde a son Antarctique", a écrit Thomas Pynchon, rien n'est moins vrai dans ce récit magnifique qu'on ne peut lâcher avant de l'avoir accompagné à son terme.
« Je n'ai pas l'impression d'avoir été enfant, adolescent, homme d'âge mur, puis vieux. Je suis à la fois enfant, adolescent, homme d'âge mûr, et vieux. C'est sans doute un peu idiot. Mais ça change tout. »
Être riche, à chaque époque de notre existence, de tous les moments qu'on a vécus, qu'on vit, qu'on vivra encore : c'est cela, la vie en relief. Voir ses souvenirs et ses sensations non pas additionnés les uns aux autres, mais comme démultipliés, à l'infini. Vivre comme si c'était la première fois. Trouver de la beauté dans l'ordinaire des choses. Aimer vieillir, écouter le bruit du temps qui passe. Ce livre est un aboutissement : celui d'une carrière, celui d'une vie d'homme. Certainement un des plus grands livres de Philippe Delerm.
Inventeur d'un genre dont il est l'unique représentant, l'« instantané littéraire », Philippe Delerm s'inscrit dans la lignée des grands auteurs classiques qui croquent le portrait de leurs contemporains, tels La Fontaine ou La Bruyère. Il est l'auteur de nombreux livres à succès, dont La Première Gorgée de bière, Je vais passer pour un vieux con ou Sundborn ou les Jours de lumière (prix des Libraires, 1997).
Que peut la plume de l’écrivain face aux pires atrocités de notre époque ? C’est habité par cette question que Mario Vargas Llosa s’est rendu en Irak en juin 2003, au tout début d’une guerre qui durera huit ans. Pendant douze jours, il confrontera ses convictions à la réalité du conflit.Interroger les civils à cette époque-là et dans ce lieu-là, c’est interroger tous les civils de toutes les guerres – c’est rendre leur parole aux femmes et aux hommes que les intérêts géopolitiques étouffent.À partir des témoignages recueillis, Mario Vargas Llosa a rédigé une magnifique série de reportages, réunis aujourd’hui intégralement dans ce livre. Il interroge la difficulté à penser la guerre au moment où elle se produit et confronte la réalité vécue par les populations à l’idéal démocratique occidental qui commande certains conflits.Mario Vargas Llosa, né en 1936 au Pérou, a vécu notamment à Madrid, Paris, Londres ou Barcelone. Prix Nobel de Littérature en 2010, il est l’une des figures les plus reconnues de la littérature mondiale. Romancier, dramaturge et essayiste, ses œuvres ont été couronnées par les plus prestigieux des prix littéraires. Il a été élu membre de l’Académie française en 2021.Traduit de l’espagnol par Annie VignalPréface d’Albert Bensoussan
Ce récit d'anticipation nous plonge au coeur des débats scientifiques d'un futur indéterminé. Quelque part entre faits scientifiques et affabulations poétiques se dessine un horizon troublant : et si les araignées, les wombats et les poulpes nous adressaient des messages codés à travers leurs comportements ? Par cette étonnante expérience de pensée nourrie des plus récentes découvertes scientifiques, Vinciane Despret ouvre la voie à un décentrement de la condition humaine sur Terre.
"Ce jour-là, le 25 août 2015, l'événement n'est pas : un ours attaque une anthropologue française quelque part dans les montagnes du Kamtchatka. L'événement est : un ours et une femme se rencontrent et les frontières entre les mondes implosent. Non seulement les limites physiques entre un humain et une bête qui, en se confrontant, ouvrent des failles sur leurs corps et dans leurs têtes. C'est aussi le temps du mythe qui rejoint la réalité ; le jadis qui rejoint l'actuel ; le rêve qui rejoint l'incarné."
Autobiographie romanesque de Madeleine Gonzalès, connue par un portrait d'elle enfant au XVIe siècle et frappée d'hyperpilosité comme son père, "sauvage" du roi de France, et certains de ses frères et soeurs : des personnages singuliers, placés en marge de l'histoire officielle mais qui ont pourtant excité l'imagination et la curiosité des princes et des savants. Un roman passionnant de Mario Pasa sur cette lignée velue, qui nous offre de regarder les "monstres" avec les yeux d'un homme de la Renaissance tout en abordant des questions très actuelles, comme l'ostracisme, notre rapport à la nature et le pouvoir des images.
Il existe depuis toujours des Journaux de voyage, de rêve, de deuil, mais pas de nage. Pourtant, quoi de plus fragile et puissant, éphémère et total, sensuel et inspirant que le plaisir du bain ? En tenant le Journal de son été 2021 à Nice, Chantal Thomas innove, et poursuit l'entreprise paradoxale entamée avec Souvenirs de la marée basse, portrait de sa mère en nageuse : doter d'une mémoire ce qui, se traçant sur l'eau, se jouant dans un effet de lumière, est voué à l'effacement.
« Comme sont loin de moi par exemple les muscles de mes bras. » Cette phrase de Kafka, véritable fil conducteur, a été le déclic à partir duquel il lui a semblé essentiel, au sortir du confinement, de célébrer le chemin flottant d'un retour à soi, d'une harmonie retrouvée avec son corps et avec le monde.
Tout commence par une missive inattendue que Patrice Franceschi reçoit depuis les brumes lointaines de Saint-Pierre et Miquelon, façon « Crabe-Tambour » : Sébastien Lemoine, jeune officier de marine dont il n'a plus de nouvelles depuis huit ans, lui annonce qu'il vient de prendre le commandement du patrouilleur Fulmar et s'apprête à partir en mission vers le cercle arctique. Il l'invite à le rejoindre. Huit ans plus tôt, il était second lieutenant à bord du trois-mâts La Boudeuse, dont le capitaine était alors Franceschi. Les rôles s'inversent et une étonnante expérience commence...
Patrouille au Grand Nord est le récit de ces retrouvailles et du périple rare qui va s'ensuivre. Au cours de leur navigation à travers les immensités polaires, les deux hommes et leurs onze camarades d'équipage se trouvent entraînés dans l'une de ces odyssées à la Jack London qui faisaient jadis la grandeur de l'aventure : danger des tempêtes au large de Terre Neuve, péril des icebergs errant partout, splendeur des glaciers cadenassant les fjords du Groenland, étourdissante beauté des aurores boréales, enchantement des baleines et rorquals hantant ces parages.
Menant des exercices de sauvetage avec la marine danoise, ils découvrent en même temps la vie des Inuits, partagés entre tradition et modernité, et prennent conscience que la beauté hors normes de leur monde est menacée par les enjeux géopolitiques dus au réchauffement climatique.
Au coeur de cet univers, les marins du Fulmar accomplissent leur mission et tirent de la contradiction entre leur existence dans le milieu clos de leur navire et les étendues démesurément libres où ils évoluent une forme « d'harmonie des contraires ». Des figures humaines attachantes se dévoilent ainsi au milieu des espaces glacés et font de cette Patrouille au Grand Nord un récit littéraire où action et poésie s'entremêlent à chaque page.
L'Empreinte d'Alex Marzano-Lesnevich a reçu le Grand Prix des Lectrices de Elle 2019 et le Prix du Livre étranger 2019 France Inter / JDD.Etudiante en droit à Harvard, Alexandria Marzano-Lesnevich est une farouche opposante à la peine de mort. Jusqu'au jour où son chemin croise celui d'un tueur emprisonné en Louisiane, Rick Langley, dont la confession l'épouvante et ébranle toutes ses convictions. Pour elle, cela ne fait aucun doute : cet homme doit être exécuté. Bouleversée par cette réaction viscérale, Alexandria ne va pas tarder à prendre conscience de son origine en découvrant un lien entre son passé, un secret de famille et cette terrible affaire qui réveille en elle des sentiments enfouis. Elle n'aura alors cesse d'enquêter inlassablement sur les raisons profondes qui ont conduit Langley à commettre ce crime épouvantable.
Dans la lignée de séries documentaires comme
Making a Murderer, ce récit au croisement du thriller, de l'autobiographie et du journalisme d'investigation, montre clairement combien la loi est quelque chose d'éminemment subjectif, la vérité étant toujours plus complexe et dérangeante que ce que l'on imagine. Aussi troublant que déchirant.
De livre en livre, Ivan Jablonka ouvre des voies nouvelles. Avec une audace et une créativité peu communes, il invente ses sujets et ses formes. Après Laëtitia, après En camping-car, il explore sa « garçonnité » dans les années 1970-1980, s'interrogeant sur le « nous-garçons » et les frontières incertaines entre masculin et féminin.
De sa famille au service militaire en passant par l'école, il raconte sa formation au fil d'une enquête souvent poignante, parfois drôle - toujours passionnante - où beaucoup pourront se reconnaître. Car cette « autobiographie de genre » dévoile une intimité à la fois individuelle, sociale et politique : l'histoire d'une génération. Avec une honnêteté troublante, Ivan Jablonka analyse le « malaise dans le masculin » qui fut le sien, restituant le vif et l'éclat de l'enfance dans ses enthousiasmes, ses émois et ses peines.
Aucun de nous ne reviendra est, plus qu'un récit, une suite de moments restitués. Ils se détachent sur le fond d'une réalité impossible à imaginer pour ceux qui ne l'ont pas vécue. Charlotte Delbo évoque les souffrances subies et parvient à les porter à un degré d'intensité au-delà duquel il ne reste que l'inconscience ou la mort. Elle n'a pas voulu raconter son histoire, non plus que celle de ses compagnes ; à peine parfois des prénoms. Car il n'est plus de place en ces lieux pour l'individu.
« Une voix qui chuchote, déchirante. Un chuchotement à fleur de vie et d'horreur. Cette voix une fois entendue vous obsède, ne vous quitte plus. Je ne connais pas d'oeuvre comparable à celle de Charlotte Delbo, sinon Guernica, sinon le film Nuit et brouillard, même pudeur, même déchirure, même atroce tendresse, chez cette femme, chez Alain Resnais. Cette douloureuse et bouleversante incantation est de ces livres rares qui laissent soudain le lecteur en pays étranger à lui-même. » (François Bott, L'Express, 1970)
Aucun de nous ne reviendra est paru aux Éditions de Minuit en 1970.
Elle est parfois paresseuse, souvent têtue, mais toujours affectueuse. Il s'agit de Modestine, l'ânesse qui accompagne, dans ce récit autobiographique, Robert Louis Stevenson, lors de sa singulière traversée des Cévennes. Ensemble, ils partagent cette aventure, ponctuée de multiples rencontres et imprévus. Et malgré leur lien orageux, une amitié atypique éclot peu à peu au sein de ce duo aussi original qu'attachant.
' Il faisait déjà chaud. J'attachai ma veste au paquetage, et je cheminai en bras de chemise. Modestine elle-même était de fort bonne humeur, et se lança spontanément, pour la première fois à ma connaissance, dans un trot cahoté qui, à chaque secousse, envoyait les avoines danser dans la poche de mon manteau. Derrière moi, au nord du Gévaudan, la vue s'étendait à chaque pas.
« Je vis dans une ville qui subit l'amour de plus de trente millions de personnes par an. Aucune raison de se plaindre, me direz-vous ; il y a pire comme destin : être atteint de leucémie, de toxicomanie, ou encore survivre dans les déserts glacés des zones polaires où seules certaines variétés de lichens osent pousser. Et pourtant, aujourd'hui pour ses habitants, vivre à Venise signifie surtout observer sa ville en train de mourir. »
Mariée à un Vénitien depuis de longues années, c'est seulement lorsqu'elle a su piloter sa topetta sur la lagune que Petra Reski s'est sentie pleinement vénitienne. Dans ce livre dédié à « sa » ville, elle partage ses souvenirs intimes entre le cinéma San Marco, le théâtre Ridotto et d'autres lieux mythiques et nous fait partager la parenthèse enchantée du confinement qui a rendu les canaux à ses habitants...
Cette déclaration d'amour vivante et attachante est avant tout une contre-carte postale. Écrit sans complaisance, ce récit témoigne de la nécessité d'un engagement politique et citoyen pour sauver Venise de la corruption institutionnalisée, du tourisme destructeur et de l'urgence écologique qui la menacent.
Naturaliste, géographe, explorateur, Alexander von Humboldt (1769-1859) est le grand scientifique des Lumières. Il a donné son nom à des villes, des rivières, des chaînes de montagnes, à un courant océanique d'Amérique du Sud, à un manchot, à un calmar géant - il existe même une Mare Humboldtianum sur la Lune.
Sous la plume d'Andrea Wulf, sa vie se lit comme un roman d'aventures : Humboldt a organisé des expéditions dans la forêt tropicale, escaladé les plus hauts volcans du monde et rencontré des princes et des présidents, des scientifiques et des poètes. Napoléon le jalousait ; Simón Bolívar s'est imprégné de ses idées pour mener à bien sa révolution ; Darwin a embarqué sur le Beagle à cause de lui ; et le capitaine Nemo de Jules Verne possédait tous ses livres dans sa bibliothèque.
À une époque où l'on pouvait embrasser toutes les connaissances scientifiques, Humboldt n'a cessé d'arpenter le monde pour en déceler les secrets et les expliquer. En 1800 déjà, il prédisait les changements climatiques causés par l'homme. Ses idées ont révolutionné la science, la politique, l'art et la théorie de l'évolution. Grand visionnaire, amoureux du monde vivant, de ses mystères et de ses beautés, Humboldt a inventé la nature telle que nous la percevons aujourd'hui.